Entre augmentation frénétique des cas, confinement puis rétropédalage, incendie dans la forêt diplomatique et interdiction de sortir de la ville, la porte d’entrée le plus au nord du continent souffre le martyr. Le point dans une ville devenue, malgré elle, le porte-étendard national d’un virus parti pour durer…
La confusion engendrée, il y a un peu plus d’une semaine, par une décision de bouclage de la ville, puis son annulation quelques heures plus tard, n’aura pas arrangé les choses. Au contraire, elle a contribué à susciter la méfiance dans la ville du Détroit. Et l’interdiction de quitter la ville pour l’Aïd Al Adha, ne fait que renforcer les craintes. Tanger qui, par rapport à sa population, enregistre le taux le plus élevé en matière de propagation du virus, risque-t-elle un effondrement total de son économie avec une population au moral touché, au moment même où la Loi de Finances Rectificative est en train d’être peaufinée ? Éléments…
Progression inquiétante. Les derniers chiffres annoncés par le Ministère de la Santé ce 23 juillet signalent une augmentation des contaminations de 302 cas sur le plan national. Parmi ceux-ci, Tanger à elle seule enregistre 110 cas (109 cas pour toute la région dont 6 à Larache, 2 à Fahs Anjra et 1 à Mdiq-Fnideq). La région se classe ainsi deuxième au niveau national avec 21,52% des cas confirmés, derrière Casablanca (24,39%), sur un total de 18.264 cas. Rien qu’en début de cette semaine, 167 nouveaux cas ont été détectés, et la ville compte, du 13 au 23 juillet, 690 cas en plus. Tanger ne pointe désormais qu’à 525 cas de Casablanca. Rapportés à la population, Tanger présente le plus fort taux de contamination du pays. Depuis 2 à 3 semaines donc, la montée en flèche des cas à Tanger inquiète et fait courir à la ville un risque de psychose générale, avec en toile de fond, une récession économique encore plus sévère. Suffisant pour entraîner une réaction rapide, de la part des autorités afin d’endiguer ce retour en grâce des cas enregistrés.
Confusion. Le dimanche 12 et le lundi 13 juillet auront offert un aperçu de la tension que subissent ceux qui gèrent la situation épidémiologique dans le pays. D’une décision de reconfiner plusieurs quartiers de la ville, après l’apparition de nouveaux foyers épidémiologiques le dimanche, le Ministère de l’Intérieur a étendu cette décision à toute la ville le lundi matin, avec plusieurs mesures restrictives draconiennes. Avant tout bonnement, d’annuler cette dernière décision, à peine quelques heures après. Ce rétropédalage, qui a donné une impression de tâtonnement et de cafouillage, n’aura fait qu’attirer la lumière sur la gestion approximative de cette crise. Depuis lors, la ville est revenue au confinement des quartiers touchés, dans l’esprit même des mesures adoptées au plus fort de la crise sanitaire dans l’ensemble du pays.
Pression sur les lits d’hôpital. Avec l’accélération du nombre de cas confirmés, la pression s’est accentuée sur les hôpitaux dont la capacité en lits d’hospitalisation est faible. Et si les hospitalisations venaient à suivre le rythme de progression du virus, Tanger pourrait se retrouver très rapidement sous une forte pression en matière de soins apportés aux patients.
Hôpital de campagne. L’incendie dans la forêt diplomatique aurait pu l’emporter, tant il s’est arrêté pas si loin des installations. Le feu, qui a éclaté au niveau des domaines forestiers avant de se propager aux régions voisines, a finalement été éteint avant qu’il n’atteigne l’hôpital. Ce dernier, conçu pour recevoir les cas légers de contamination au coronavirus, est doté d’une capacité de 700 lits, pouvant être augmentée au besoin. Depuis son installation il y a plusieurs semaines, cet hôpital de campagne a déjà accueilli plus de 1000 cas confirmés. Il a ainsi permis de relâcher la pression sur les hôpitaux publics qui se sont attelés à prendre en charge les cas graves ou critiques.
Interdiction de sortir de la ville. Dernière évolution en date, les travailleurs à Tanger, notamment dans la zone industrielle, sont interdits de quitter la ville pour regagner leurs familles pour la période de l’Aïd Al Adha. La décision prise par le Wali de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Mohamed Mhidia, a été annoncée à l’issue d’une réunion tenue avec les associations professionnelles, les autorités locales, les organismes sociaux, la Chambre de Commerce, d’Industrie et de Services de la région et Amendis. En ajoutant à cette interdiction que « les chefs d’entreprises assumeront leur responsabilité en cas de délivrance d’une quelconque autorisation », Adil Rais, président de la CGEM Tanger-Tétouan-Al Hoceima, veut mettre ceux-ci devant leur responsabilité. Elevant de fait l’urgence autour de la situation de cette ville.
Colère et incompréhension. À en croire un confrère, les Tangérois ont très peu goûté au fait que le Ministre de la Santé n’a pas voulu « prononcer le nom de leur ville lors de sa récente conférence de presse conjointe avec le Chef du Gouvernement ». Une colère s’est donc levée contre ledit Ministre dont certains exigent même la tête. « La majorité des associations et des acteurs politiques de Tanger ont tenu à montrer leur irritation. Des pétitions ont vu le jour, certaines exigeant des excuses de la part d’Aït Taleb, d’autres le sommant de présenter sa démission ou demandant son limogeage », écrit l’organe de presse. Une missive devrait être envoyée au cabinet royal pour protester contre cette « humiliation ».
La situation dans la ville du Détroit est donc alarmante. Et la région du nord pourrait, si le virus n’est pas contenu, en arriver à supplanter Casablanca dans peu de temps. D’autant plus que l’ouverture des frontières permet désormais aux traversées maritimes de débarquer des voyageurs dans la ville. Tanger mérite toute l’attention des autorités afin d’entraver cette progression dangereuse du virus.
Selon Challenge.ma
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