C’est connu. Lors de la campagne électorale, la bataille entre partis est à couteaux tirés. Tous les moyens sont bons pour donner des coups aux autres adversaires. Accusations des partis concurrents, minimisation de leurs actions lorsqu’ils géraient certaines assemblées… L’objectif est d’affaiblir l’adversaire et d’écorner son image auprès des électeurs. Généralement, la campagne électorale est souvent l’occasion pour taper fort, notamment à travers le recours à des formules dures à l’égard des autres concurrents. Mais cette année, la violence verbale lors des meetings des partis politiques est plus accentuée. Insultes et accusations fusent de toutes parts. Une situation grave, surtout que les citoyens se retrouvent perdus face à ces altercations, qui s’éloignent des questions qui touchent à leur vie quotidienne. Pour Mohamed Amrani Boukhobza, professeur de sciences politiques à l’Université Abdelmalek Sebti à Tanger, «cela est lié à la nature du discours politique, marqué ces dernières années par la montée du populisme». Ce qui a conduit, selon lui, «à l’utilisation d’un jargon inhabituel, qui était même inconcevable auparavant». Or, ceci est d’autant plus préoccupant lorsque ces accusations sont proférées par le chef du gouvernement, qui a repris sa casquette de chef de parti, et rejoint la campagne électorale sur le terrain. Dans sa tournée dans les différentes régions pour soutenir les candidats du PJD, Abdelilah Benkirane s’est attaqué frontalement à ses principaux adversaires. Ceci n’est pas nouveau, selon ce politologue, qui a rappelé que le chef du gouvernement avait déjà traité, par le passé, certains politiciens de «mafieux». Généralement, «cela s’inscrit dans la logique de la campagne électorale qui repose sur la nécessité de mobiliser les troupes et attiser leur enthousiasme à travers un langage qui peut faire tilt», a-t-il expliqué. Concrètement, «il s’agit de dénigrer les autres adversaires pour redorer le blason du parti», a souligné Boukhobza. Ainsi, PAM et Istiqlal étaient souvent présents dans les sorties tonitruantes du patron du PJD. A Fès, Oujda, Agadir ou Casablanca, Benkirane a réglé ses comptes avec ces deux formations de l’opposition. Il n’a pas hésité à taxer le PAM de «parti arriviste monté de toutes pièces», ou collant à Hamid Chabat le sobriquet de «fou de Fès» (cf.www.leconomiste.com). Pire, il n’a pas hésité à accuser le PAM de financer sa campagne électorale par l’argent provenant du trafic de drogue. Benkirane aurait voulu créer la zizanie entre le PAM et l’Istiqlal en avançant que c’est «Chabat qui avait formulé cette accusation à l’encontre d’Ilyass El Omari, dans une vidéo qui circule sur internet». Pour le politologue, «nous sommes face à une situation où il y a une sorte d’accord tacite entre les chefs de partis politiques de ne pas engager des poursuites judiciaires concernant leurs attaques mutuelles». Mais, les dirigeants du parti du tracteur ne semblent pas être du même avis. Ils ont réagi aux accusations de Benkirane, en affirmant qu’une plainte sera déposée auprès du ministère de la Justice. Abdellatif Ouahbi, candidat du PAM aux élections régionales et vice-président de la Chambre des représentants, a affirmé qu’une enquête doit être ouverte concernant ces déclarations. Plusieurs autres observateurs et politiques ont estimé que ces sorties constituent des dérapages. Surtout qu’elles proviennent du chef du gouvernement, censé superviser les élections et diriger l’appareil exécutif, qui peut ordonner l’ouverture d’une enquête et engager des poursuites judiciaires dans des cas similaires. D’autant que Abdelilah Benkirane n’a pas cessé de rappeler sa responsabilité dans l’organisation des élections et du bon déroulement de cette opération, dans un contexte transparent. La même intensité de violence verbale est reproduite par d’autres dirigeants du PJD, à l’image de Aziz Rebbah, ministre de l’Equipement et du Transport, et candidat aux régionales à Kénitra. Il n’a pas hésité à traiter les opposants à son parti de «chiens». Dans un statut sur sa page Facebook, il a critiqué certains médias qui «font la promotion des chiens qui aboient, sans mettre en valeur la caravane qui continue son chemin», en reprenant un vieil adage populaire.
Campagne fade dans les quartiers huppés
Au moment où la bataille des slogans de la campagne électorale fait rage dans les secteurs populaires, les quartiers huppés, notamment à Casablanca, semblent plutôt épargnés. Des citoyens des communes d’Anfa ou du Mâarif s’interrogent sur l’absence de visites des candidats et la non distribution de tracts dans leurs zones d’habitation. La rédaction de L’Economiste a reçu plusieurs appels de citoyens qui veulent accomplir leur devoir citoyen en allant voter, mais sans disposer d’informations sur les candidats en lice dans leurs circonscriptions.
M.A.M.
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