mercredi 19 février 2020

Grâce à la numérisation par lasergrammétrie et photogrammétrie, il a été possible de reconstituer la célèbre mosquée inachevée Hassan à Rabat en 3D, et même de la compléter pour la présenter sous sa forme finalisée. Ce travail d’universitaires pourrait bénéficier au grand public et aux touristes qui se déplacent pour visiter le monument, si le ministère de la Culture décide de le mettre à profit pour promouvoir le site (Source: MIS )Au Maroc, des milliers de patri­moines historiques et de trésors archi­tecturaux, classés et non classés, sont en déperdition. Un gâchis gigantesque! Pour­quoi ne pas les préserver au moins sur le plan numérique? C’est l’idée que défend El Mustapha Mouaddib, un professeur en robotique, originaire de Béni Mellal, qui a mené une brillante carrière universitaire en France.Mouaddib, enseignant à l’université de Picardie, est derrière le programme de nu­mérisation de la cathédrale d’Amiens. Un projet titanesque démarré en 2010, s’étalant sur 15 ans (clôture en 2025). Il a également été la cheville ouvrière de la numérisation de la mosquée Hassan à Rabat, démarrée en 2015, et qui a impliqué plusieurs éta­blissements de l’enseignement supérieur marocains (l’université Mohammed V, l’ENSIAS de Rabat, l’IAV et l’INPT), en plus du Laboratoire de recherche en infor­matique et télécoms (associé au CNRST), du laboratoire Modélisation, information et systèmes (MIS) d’Amiens et de l’École nationale des sciences géographiques (EN­SG-IGN) à Paris. Fort de son expertise, il est actuellement en «négociation avancée» pour la réalisation d’une copie numérique de la plus ancienne université au monde, Al Qaraouiyyine à Fès.«L’enjeu est impor­tant, car la sauvegarde du patrimoine est onéreuse. La solution numérique n’a pas vocation à se substituer à la sauvegarde réelle, mais elle permet à la fois de préser­ver le patrimoine de manière virtuelle, et de faciliter sa restauration ultérieure. Elle rend aussi les monuments plus accessibles et plus attrayants pour les touristes», relève Mouaddib.Dans le cas de Hassan, dont la construction n’a jamais été achevée, le pro­jet a permis de reconstituer le monument et de le présenter sous sa version complète. «Il est possible d’installer deux ou trois bornes sur place, où les visiteurs peuvent trouver des informations sur le site dont on ne trouve que peu de documentation. Beaucoup croient que les piliers autour de la mosquée sont des vestiges romains! J’ai proposé l’idée au ministère de la Culture, malheureusement, je n’ai reçu aucune réponse», regrette le spécialiste en robo­tique.En France, dans le cadre du projet de la cathédrale, les visiteurs peuvent se promener à l’intérieur du bâtiment grâce à des lunettes d’immersion. Des applications interactives sur internet ont, par ailleurs, été développées. Les avantages de ce genre de projet ne s’arrêtent pas là. «L’initiative peut également servir à former les étudiants sur des technologies de pointe, et à les sensibiliser au patrimoine national», rajoute Mouaddib.Réalité virtuelle et imagerie 3D, robotique, reverse enginee­ring, photogrammétrie… Au­tant de technologies auxquelles des étudiants, en informatique, histoire de l’art, archéologie, architecture…, peuvent être formés. Ils peuvent aussi s’ini­tier à la recherche scientifique autour de ces thématiques.C’est donc du win-win: préservation et rentabilisation du patrimoine, formation des étudiants, production profes­sionnelle de data et promotion de la recherche. Encore faut-il que tous les intervenants y adhèrent: universités et écoles, autorités locales, ministères…, et même les entreprises qui pourraient à la fois être spon­sors ou prestataires de services (développement de logiciels et plateformes numériques, com­merce autour des sites…).En novembre 2018, le ministère de la Culture avait annoncé un plan pour la documentation du patrimoine architectural et archéologique à l’aide des nouvelles technologies. Mais peu de détails en ont été révélés. En attendant, des patrimoines continuent d’être perdus. D’autres, non classés, comme des mos­quées datant de plusieurs siècles, sont restaurés (ou massacrés!) de manière arbi­traire par des mécènes.Notre Dame de Paris aurait pu être sauvée par le numériqueNumériser de grands patrimoines peut nécessiter plusieurs années de mobilisation, car les mesures y sont prises millimètre par millimètre. «Et cela coûte cher. D’où l’intérêt de passer par les universités. Nous pouvons construire des partenariats pluridisciplinaires avec des étudiants, en informatique, archi­tecture, histoire de l’art… et monter des task-forces pour travailler sur des monuments pendant une période donnée», suggère El Mustapha Mouaddib. Le professeur de robotique est également membre du groupe chargé de la numérisation de la cathédrale Notre Dame de Paris. Un site pour le moins dif­ficile (contamination au plomb, des échafaudages déformés par le feu, risques d’accidents…). «La numérisation de Notre Dame n’a jamais été réalisée com­plètement, après quelques tentatives, y compris américaines et allemandes. Aujourd’hui, on le regrette. Si nous avions un modèle numérique précis de l’ensemble du bâtiment, nous aurions pu comparer le site avant et après l’incen­die, mieux évaluer l’ampleur des dégâts et tout reproduire», confie l’expert.Ahlam NAZIH



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