samedi 30 mai 2015

Vent de reprise pour le secteur de la microfinance malmené par la crise depuis 2009. En effet, les premières mesures prises dans le cadre de la stratégie vision 2020 commencent à apporter leurs fruits. Les résultats obtenus ces dernières années laissent profiler une convalescence progressive du secteur. Le nombre de clients bénéficiaires a atteint 867.700 personnes en 2014 contre 797.700 en 2011, année marquant l’aggravation de la crise du secteur. Mais cette reprise reste encore loin des performances enregistrées en 2007, soit près 1,4 million de clients. Par contre en termes d’encours de prêts, «le volume réalisé en 2014, de près de 5,7 milliards de DH, dépasse légèrement celui de 2007 (près de 5,5 milliards de DH)», indique Mohammed El Mazouri, délégué général de la Fédération nationale des associations de microcrédit (FNAM).
«La crise au Maroc a cependant été à la fois moins grave et moins longue que celle des marchés auxquels elle est souvent comparée», selon un document publié en 2014 par l’IFC du groupe Banque mondiale. Ses auteurs rappellent que «la période la plus sévère a duré une année seulement et en 2011, le secteur s’était déjà stabilisé». Si aujourd’hui on peut évoquer une sortie de crise, c’est grâce aux actions entreprises pour assainir et consolider le secteur, menées dans le cadre de la première étape de la stratégie du secteur vision 2020 lancée en 2012 et dont les premiers bénéfices commencent à se faire ressentir, indique El Mazouri. Une stratégie appliquée suite à la crise qui a ébranlé un secteur encore dans ses premières années d’existence au Maroc. La microfinance a succombé à la conjoncture internationale marquée par la crise mondiale de 2008, mais surtout au laxisme dans le fonctionnement de certains opérateurs du secteur notamment en matière de maîtrise du risque et de solvabilité des clients. Ce qui a contribué au surendettement des clients bénéficiaires et des associations de microcrédit au niveau de la région de Ouarzazate. Une affaire s’est transformée en crise sociale avec une ampleur médiatique sur le plan national et international. Parmi les causes du surendettement, et par conséquent de l’insolvabilité de ces clients, on avance les crédits croisés qui permettaient de contracter plus d’un crédit.
«En 2008, les emprunts croisés représentaient près de 39% des portefeuilles des clients ayant bénéficié de deux prêts simultanés ou plus contre 12% actuellement», signale le responsable à la Fnam. Cette baisse revient aux mesures prises notamment dans le cadre du renforcement de la maîtrise du risque ainsi que la capacité d’endettement des clients, ce qui va permettre d’assurer leur protection par la suite. Parmi ces mesures, la mise en place par les grands AM Cs (associations de microcrédit) d’une centrale de risque informelle. «Depuis 2008, elles ont commencé à échanger des informations sur les impayés de leur clientèle pour limiter les risques liés aux prêts croisés», rappelle une source proche dossier. Quatre principales AM Cs (détenant près de 90% du marché) se sont intégrées à la centrale des risques, qui contrôle la solvabilité des emprunteurs: Al Amana, Attawfiq (Fondation Banque Populaire pour le microcrédit), Al Baraka (Fondep) et Ardi.
Mis en place en 2009, le crédit bureau est venu unifier le système d’appréciation des risques qui regroupait la Centrale des risques de Bank Al-Maghrib (BAM) et trois autres entités privées. Selon notre source, «cette refonte répond à une insuffisance du système antérieur, peu fiable, et ne permettant pas de prendre en compte l’ensemble du périmètre, ni d’apprécier le niveau d’endettement global». «La mise en place du crédit bureau avait pour objectif le suivi du comportement des emprunteurs, la prévention contre l’endettement croisé et le surendettement et un accès au crédit plus large notamment pour les PME». Ces dispositifs ont permis une réduction significative du niveau de l’endettement croisé entre les AM Cs, est-il indiqué.

Coût de l’inclusion

On reproche aux associations de microcrédit de gagner de l’argent au détriment d’une population déjà marginalisée avec des moyens limités. Cela par l’application des taux de rendement supérieurs à ceux pratiqués par les banques, avancent les ONG qui défendent le dossier des clients d’Ouarzazate. Pour elles, les taux élevés, plus de 20%, appliqués par les associations de microcrédit figurent parmi les causes de l’insolvabilité d’une partie des clients. Certes, les opérateurs affichent des ambitions d’ordre social, mais leur mission principale reste l’inclusion financière au profit d’une population dépourvue de toute offre dans ce sens, tient à préciser un responsable d’une association de microcrédit. «Le coût de l’inclusion est estimé par la profession à plus de 13%, auquel il faut ajouter d’autres charges d’exploitation, y compris le coût financier», est-il expliqué. On rappelle que les associations de leur part empruntent sur le marché financier. Ce qui explique la réclamation de la mise en place d’un nouvel environnement institutionnel qui tient compte de notre réalité, notre contexte mais aussi des meilleures pratiques au niveau international, signale El Mazouri. Pour lui, l’objectif est de parvenir à la pleine inclusion sociale et financière au moyen de l’élargissement des services financiers à des millions de personnes et qui sont toujours exclues.

Noureddine EL AISSI



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