lundi 29 juin 2015

Si loin et pourtant si proches… Le Maroc et l’Afrique du Sud, deux pays aux modèles économiques différents, se disputent néanmoins les premières places en termes d’attractivité sur le continent. Selon l’agence de notation Standard and Poor’s, il existe entre ces deux économies des ressemblances et de grandes divergences qui donnent à chacune des avantages comparatifs. Certes, l’Afrique du Sud et le Maroc détiennent la même note souveraine «BBB-» de crédit à long terme en devises étrangères. Mais dans leur monnaie locale, l’Afrique du Sud (BBB+) devance de deux crans le Maroc (BBB-) témoignant d’une grande flexibilité monétaire, analysent les experts de S&P. Malgré son caractère risqué et instable, l’Afrique du Sud dépend fortement des investissements de portefeuille pour financer le déficit de sa balance courante. Ceux-ci représentent plus de 2,1% du PIB, contrairement au Maroc où leur poids ne dépasse guère les 0,2% du PIB. La recette «magique», selon l’agence de notation, dépend de deux ingrédients: la sophistication des marchés des capitaux combinée au statut international et le taux de change flottant du rand (monnaie sud-africaine). Par définition, une monnaie plus souple permet de stabiliser l’économie et d’en amortir les chocs en cas de difficultés. Le dirham qui évolue dans un régime de change indexé (60% euro, 40% dollar), ne peut se permettre ce niveau de flexibilité. Il s’appuie sur un système qui limite les capacités de Bank Al-Maghrib à mener une politique monétaire indépendante, mais qui permet de maintenir un niveau d’inflation bien plus faible que l’Afrique du Sud. Même si la libéralisation progressive du régime fait partie des plans de la Banque centrale, S&P ne se fait pourtant aucune illusion sur le projet. «Nous pensons que les changements s’effectueront lentement et que la stabilité des prix restera la priorité de la banque centrale», soulignent les experts.
S&P rappelle, par ailleurs, la similitude des déficits du compte courant, les besoins de financement externes et les charges de la dette, tout en indiquant que le Maroc gagne des points dans la gestion de son endettement.  Bien que leurs dettes publiques et extérieures correspondent à une part comparable de leur PIB (entre 45% et 48%), le Maroc pourrait réduire ses déficits plus rapidement. L’agence américaine s’attend, dans ce sens, à ce que les deux pays continuent à traîner des déficits budgétaires durant les quatre prochaines années au moins.
L’agence d’évaluation précise aussi que la profondeur du marché des capitaux de l’Afrique du Sud représente un atout considérable pour la liquidité du marché. La capitalisation globale de la Bourse de Johannesburg est 17 fois plus élevée que la place casablancaise. Le montant des échanges est pratiquement dans le même ordre de grandeur. Bien qu’absent des instances continentales telles que l’Union africaine, le Maroc ambitionne d’ouvrir les portes de l’Afrique francophone aux investisseurs étrangers. Ses entreprises ont activement investi la zone UEMOA depuis quinze ans. Le Royaume tente de mettre en avant sa future place financière régionale, Casablanca Finance City, qui devrait remplir le rôle d’instrument de la convergence financière en Afrique de l’Ouest.
Sur le plan macroéconomique, le contraste est toujours aussi insolite. Si l’Afrique du Sud dispose d’un niveau de revenu deux fois plus élevé que celui du Maroc, le taux de croissance de ce dernier est nettement plus important. Une situation qui, selon l’agence de notation, renvoie au succès des nouvelles industries marocaines, favorisées par la politique industrielle du gouvernement et qui attirent davantage d’investissements privés. Alors que la production manufacturière de l’Afrique du Sud stagne depuis plusieurs années, le Maroc marque un bond sur plusieurs domaines, notamment l’automobile et l’aéronautique. «Depuis l’arrivée de Renault à Tanger, le Maroc, jusqu’alors insignifiant dans ce secteur, est devenu, en deux ans, le deuxième plus gros constructeur du continent, juste après l’Afrique du Sud», précise l’agence. Mais l’Afrique du Sud dispose pour cela d’atouts historiques conséquents: des infrastructures de qualité, de grands groupes industriels et surtout, le fait d’être devenu le «S» au sein des BRICS.

Les résultats de l’INDH

Malgré la robustesse du milieu des affaires à l’autre extrémité du continent, le Royaume s’en sortirait mieux en termes d’égalité sociale et de lutte contre la pauvreté. Les inégalités paraissent plus marquées en Afrique du Sud, avec un taux de chômage notamment qui atteint 24% contre 10% au Maroc. Aussi, pour S&P, les conditions de vie semblent meilleures au nord du continent malgré la bonne position de la partie sud dans l’ensemble des indicateurs de gouvernance. Le Maroc combat mieux la pauvreté que l’Afrique du Sud, où la pauvreté est plus accentuée en exacerbant la criminalité et les tensions politiques.

A. Lo
 



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